Pour Antonio
Parler d’Antonio, c’est parler d’une conscience qui se crée par la musique et au-delà de la musique, je veux dire l’alternance de la possession et de son détachement ou la plénitude de la matière sonore intime et l’approche du silence très unies en ce lieu que j’appellerai la musique.
Je l’ai dessiné par la lumière, les formes et le rythme, par le plein et le vide, mais comment le saisir dans tout ce qu’il a d’impalpable et pourtant de simplement communicable à qui prend le temps d’écouter la vie.
Nous sommes ici à l’approche la plus humaine d’un absolu, voici un être rare qui vit et conserve une unité dans sa foi, une sorte d’unité originelle comprise dans la musique ; je m’explique : autrefois la musique et la danse n’étaient pas séparées l’une de l’autre comme à présent, la musique naissait du corps et l’intérprétation que nous donne Antonio me restitue cette sensation première qui nous donne la motricité du corps et de l’esprit, l’envie de mouvement.
A son écoute, une chose frappe qui touche profondément, c’est la projection ou l’extériorisation de la note dans l’espace comme une lumière, et son écho c’est une vibration faite de points sonores, tissus parcouru, sorte de volume imaginaire à surfaces spirituelles développées dans le temps, au sens mystique et social, générosité du don qu’il veut partager.
Avec Léo Brouwer, le voici prendre d’autres risques. Aborder la musique qui se fait dans le présent et qui réfléchit notre passage ici bas. Riche de sa magnifique expérience : Bach, Villa-Lobos.
Il interprête presque en prise directe l’essence même de ce qui nous vivons dans les profondeurs avec le plus grand vertige contenu – il faut saluer ce moment inoubliable et réunir l’auteur et son interprète dans la pls grand émotion musicale qu’Antonio nous ait donné à ce jour.
de tous les arts, la musique est celle qui coordonne le soufle et l’air pour exister, elle demande aux musiciens d’êter les médiateurs entre terre et ciel. Antonio a une grande part de ciel en lui et c’est cette part d’infini qu’il veut nous faire toucher du doigt, son monde d’amour et d’amitiés partagés contre l’injustice ouvert à l’harmonie universelle.
Henri Yeru
(extrait du disque vinyle n°4 consacré à Brouwer, Bach, Riera et Vivaldi)